L’HABITAT SOCIAL
Avec 80 000 emplois directs, 140 000 emplois indirects et 17 milliards d’euros d’investissement annuel[1], l’Habitat Social n’est pas à proprement parler un secteur professionnel « inconnu ».
Il fait cependant partie des secteurs largement ignorés des cadres en recherche de sens. L’Habitat Social n’est pas a priori le secteur qui fait le plus rêver nos jeunes diplômés futurs entrepreneurs sociaux.
Et pourtant vous découvrirez dans cet article pourquoi nombre de salariés y ont trouvé le triptyque de l’épanouissement professionnel : du sens, une rémunération satisfaisante au regard de certains secteurs de l’ESS et de multiples challenges à relever.
C’est beau un HLM, la nuit…
1 – VOUS VOULEZ DU SENS ? AGISSEZ POUR LE « VIVRE ENSEMBLE »
La question du sens professionnel ne s’analyse pas via une hiérarchie des natures d’engagements entre défense de droits fondamentaux (vivre en sécurité, disposer d’un toit, avoir de quoi se nourrir, préserver sa santé,…) et de causes d’intérêt général (préserver l’environnement pour soi-même et les générations futures, accroître la cohésion sociale, préserver la faune et la flore, …).
Elle dépend de chaque candidat, des situations qui le touchent, des valeurs qui le caractérisent et pour lesquelles il considère pouvoir se mobiliser et agir avec pertinence et efficacité
Les métiers de l’Habitat Social s’adressent principalement aux 4,5 millions de logements sociaux que compte le secteur HLM. Les challenges auxquels ils doivent répondre sont multiples et les réponses apportées contribuent à construire la France de demain.
Qu’il s’agisse de définir des politiques (peuplement et mixité sociale, attributions et loyers,..) de construire (plus et plus rapidement, mieux et moins cher), d’optimiser les équipements (plus de confort et maîtrise des charges), de gérer (rationaliser les coûts de gestion, réduire la vacance et les impayés), d’accompagner (gestion de proximité, gestion sociale, dynamique du vivre ensemble,…), les défis à relever sont en effet variés et souvent interdépendants dans un environnement où interagissent également de multiples facteurs externes notamment politiques, économiques, sociaux, réglementaires.
Chose rare dans le monde merveilleux de l’ESS, les métiers de l’Habitat Social font partie de ceux qui ont un impact sociétal de court et de long terme : ainsi peuvent coexister des actions à impact rapide, liées à la gestion de proximité, à la maîtrise de l’exploitation et des charges, à l’amélioration de prestation d’entretien… et des actions à impact long-terme : politiques de peuplement, nouvelles constructions, réhabilitation lourde…
2 – DES SALAIRES BIEN POSITIONNES PARMI CEUX DE L’INTÉRÊT GÉNÉRAL
Moi je m’en fous d’avoir un métier qui me plaise, ce que je veux, c’est un salaire qui m’épanouisse !
Régis Mailhot
Pour faire « rêver » nos jeunes diplômés, ne nous mentons pas, la question du salaire doit accompagner l’intérêt pour les postes visés. Après 3 à 5 ans d’études, ceux-ci aspirent quand même à gagner à peu près autant que leurs collègues du « privé » !
De la maîtrise d’ouvrage, à la gestion locative et sociale, en passant par les directions départementales de la cohésion sociale, l’Habitat Social propose des emplois pour un large éventail de profils, et des salaires attractifs. Ainsi, un directeur général H/F débutant dans sa structure verra son salaire se positionner entre 65 et 75k€/an, un contrôleur de gestion H/F expérimenté touchera entre 45 et 60k€/an, un ou une gardienne d’immeuble gagnera aux alentours de 20k€/an.
3 – UN INTÉRÊT INTELLECTUEL
Pour nombre de candidat(e)s, deux conditions de l’intérêt intellectuel du travail résident dans la complexité des thématiques et leur renouvellement.
En termes de complexité, des problématiques telles que la résorption de l’amiante en site occupé avec ses différents aspects techniques, économiques, organisationnels, sociaux et leurs impacts sur la capacité à mener des projets de construction et de rénovation ; ou, sur un autre plan, la recherche du meilleur équilibre en matière d’occupation sociale et de mixité dans un environnement fortement contraint par des injonctions politiques, économiques, sociales de toutes sortes mobilisent les responsables qui en ont la charge, ainsi que leurs équipes.
En termes de modernité, RSE et efficacité énergétique sont entrées dans les priorités des acteurs… en 2000. De plus, avec 17 milliards d’investissements en 2012, il est difficile d’imaginer une révolution énergétique future ne passant pas par le secteur de l’Habitat Social, d’autant plus que le secteur HLM a toujours constitué un terrain privilégié pour l’expérimentation de solutions émergentes (les PAC, la production d’ECS solaire, les équipements domotiques, la récupération de chaleur sur les eaux grises…)
Vous l’aurez compris, l’Habitat Social est un secteur directement concerné par les derniers enjeux en termes d’innovation.
Innovation et défi intellectuel au cœur des métiers de l’Habitat Social, ce secteur en pleine évolution est susceptible d’intéresser un grand nombre de jeunes diplômés souhaitant s’épanouir dans des métiers d’avenir.
BONUS : DES COLLÈGUES QUI RESSEMBLENT A LA FRANCE… DE 2015.
Le secteur de l’ESS ne représente pas à proprement parler un exemple en termes de diversité. Si l’on peut se réfugier derrière l’absence de statistiques (interdites par le cadre légal), on peut aussi constater chaque jour une réalité : les salarié(e)s de l’ESS présentent TRÈS souvent les mêmes profils : des individus blancs et d’origine aisée. L’ESS manque non seulement de variété de couleurs de peau mais également de variété d’origine sociale.
Pour en savoir plus, c’est par ici : www.orientationdurable.com/appeldiversite/ mais disons pour simplifier qu’une réunion de salarié(e)s dans l’ESS ressemble souvent à la France… de 1915.
L’habitat social représente – avec le secteur de l’insertion – l’exception à la règle. On peut y croiser des Mohamed, des Aminatas comme des Emma à tous les niveaux de responsabilité.
Plusieurs raisons prouvent que cette réalité est structurelle.
L’Habitat Social est un secteur de l’ESS qui, par son origine, a toujours évolué dans un environnement propice à la diversité de ses protagonistes. En effet, l’Habitat Social est un phénomène amorcé par des individus eux-mêmes directement touchés par les problématiques du secteur. « Le dosage en types de logements et en catégories sociales est clairement à l’origine des enjeux qui se limitent à certains quartiers ou communes. Sans doute est-ce pour cela que le thème de la mixité sociale s’impose peu à peu à ceux de la mixité urbaine ou de la diversité dans l’habitat » (extrait de Diversité de l’habitat, mixité urbaine et planification urbaine : enquête sur la mise en oeuvre des principes de la loi d’orientation pour la ville).
On retrouve logiquement ce souci de diversité dans les politiques de recrutement. On reproche souvent au développement durable, à la consommation responsable ou à l’entrepreneuriat social de perpétuer un certain « entre-soi ». Cet entre-soi est impossible dans l’Habitat social ! Le périmètre de travail (4,5 millions de logements sociaux) EST la France. L’étude comparée de L’Habitat Social montre que c’est sans doute le secteur de l’Economie Sociale et Solidaire qui encourage le plus ses acteurs à objectiver le recrutement. Des lieux de sourcing variés et souvent différents de ceux des autres acteurs de l’ESS et une reformulation des textes des offres plus ouvertes sont les clefs du recrutement d’un secteur source de diversité.
CONCLUSION
L’Habitat Social est le soldat injustement inconnu de l’Economie Sociale et Solidaire : secteur porteur de professions au contenu riche en défis intellectuels, il n’attend qu’à être découvert par les jeunes diplômés en quête de sens dans leur métier.
[1] Union sociale pour l’habitat : http://www.union-habitat.org/les-hlm-de-à-z/présentation-du-secteur/l’habitat-social-une-mission-d’intérêt-général
Par Jean-Philippe Teboul (Orientation Durable) et Philippe Barrault