Un travail avec du sens répondra-t-il à ce qui vous manque aujourd’hui dans votre environnement professionnel ?
Vous songez à vous reconvertir dans l’ESS après quelques années dans le secteur privé traditionnel ? Cet article est fait pour vous.
Orientation Durable recrute pour les acteurs de l’Economie Sociale et Solidaire, Posetadem.com informe chacun pour lui permettre d’oser suivre la voie qui est la sienne. Nous nous sommes permis en conséquence de penser qu’un article commun sur les reconversions vers l’ESS serait bienvenu.
Nous avons commencé par réaliser une enquête auprès de personnes reconverties dans l’ESS après une expérience dans l’économie « classique ». Une petite centaine de personnes ayant réalisé le switch ont gentiment répondu à un questionnaire bilan. L’objectif de l’enquête ? Comprendre la cause de leur reconversion et leur ressenti une fois dans ce secteur.
Une moitié (47%) étant ravie et une autre est mitigée, voire déçue (43%), il a fallu que l’on creuse les résultats pour comprendre dans quel cas le passage était une réussite.
Voici donc les résultats de l’enquête pour savoir si vos attentes seront comblées en fonction de ce qui ne vous convient pas dans votre environnement professionnel actuel.
VOUS SOUHAITEZ AVOIR UN IMPACT SOCIETAL
DEGRÉ DE PERTINENCE : 50%
A chacun sa vision du «bon» impact.
Ce critère pouvait paraître joué d’avance. Souhaiter plus de sens et rejoindre en conséquence un employeur qui se distingue justement par son impact social et environnemental, ça tombe… sous le sens. Pour la grande majorité des participants, c’est d’ailleurs le tout premier atout de ce secteur au regard du privé traditionnel.
Mais quitte à multiplier ses récurrences, regardons-le plus en détail, ce « sens ». Il existe environ 7 milliards de quête de sens différentes. Elle se distingue par les priorités (sociales ou environnementales) par les bénéficiaires ou encore par le rapport au système (faut-y le changer ou l’améliorer ?). Chacun d’entre nous et chaque acteur de l’ESS a la sienne.
Alors, le succès est donc parfois au rendez-vous “J’ai l’impression d’être utile au quotidien et d’apporter ma contribution à la société” mais on peut aussi constater une déception de décalage entre sa vision et celle du nouvel employeur, certains reprochant ainsi par exemple « la pensée start up et sa façon de reproduire en pire tous les travers de l’entreprise » ou à l’opposé une «méconnaissance de l’écosystème environnant pour eux, avec la hantise du résultat (le fric c’est mal, seul l’équilibre financier est pieux) »
Il n’existe pas de meilleure vision dans l’absolu, seule la vôtre compte concernant votre projet professionnel.
La question à vous poser est dans la correspondance entre votre vision d’un impact sociétal pertinent et celles des acteurs de l’ESS.
En un mot, assurez-vous en amont que le combat de l’acteur en question corresponde bien au vôtre.
VOUS ÊTES A LA RECHERCHE D’UN ENVIRONNEMENT PORTE PAR DES VALEURS FORTES
DEGRÉ DE PERTINENCE : 80%
La structuration autour de valeurs est une spécificité réelle de l’ESS.
Sous la condition donc d’une correspondance entre le sens recherché et celui proposé, les valeurs sont au rendez-vous.
La quasi-totalité des répondants à l’enquête sont élogieux au sujet de leurs collègues et des acteurs de l’ESS, à l’instar de cette participante : “Une plus grande place est faite à la personnalité et aux opinions des gens, et le questionnement partagé sur les enjeux de société permet de créer des liens authentiques entre collègues et une vraie émulation intellectuelle”.
Quelques répondants préviennent toutefois que les “nouveaux arrivants” venus du privé peuvent être regardés de travers. “Quand on arrive du privé et que ça se sait, on est catalogué” selon une participante, qui ajoute : “On trouve de tout dans l’ESS : des gens passionnés qui portent un vrai projet, et d’autres qui veulent faire du social business ”.
Une autre participante est entrepreneuse et accompagne des structures associatives : “Les relations sont très riches. Je trouve l’ambiance bien plus décontractée que dans le privé traditionnel. Chacun porte des valeurs fortes de solidarité et d’intérêt général”. En revanche selon elle, quelqu’un qui vient du privé avec des process risque de se sentir très mal à l’aise dans l’ESS. Mais cela ne doit pas être un frein, au contraire : “En ce moment l’environnement est très mouvant, on observe un décloisonnement entre ESS et privé. Il faut en profiter car les deux mondes ont des choses à s’apporter!”
Qu’on les trouve bonnes ou moins pertinentes, dévoyées ou fidèles aux principes fondateurs, les valeurs sont au cœur de l’activité de tout acteur.
L’ESS peut répondre à ce besoin de valeurs présentes quotidiennement.
VOUS NE SUPPORTEZ PLUS LES PROCESS
DEGRÉ DE PERTINENCE : 10%
Rien à voir avec l’ESS.
Si vous fuyez les process interminables des grandes entreprises traditionnelles, vous pouvez trouver votre bonheur dans l’ESS… dans certains cas ! Si certaines structures sont souples et flexibles, l’ESS reste un environnement très politisé et sclérosé d’après quelques participants.
Dans les plus petites organisations, le flou des process et le manque de structure peut être rebutant pour un salarié habitué au cadre du privé. L’une des participantes a rejoint une start-up dans l’ESS après avoir été commerciale dans le privé, et son expérience n’a pas été concluante : “Les co-fondateurs de cette start-up avaient un objectif social mais pas de business plan, ce n’était pas du tout cadré. Or, j’ai besoin d’avoir des chiffres et un suivi des objectifs.”
Certaines et certains d’entre nous s’épanouissent dans les process des grandes structures d’autres dans la souplesse des petites, cette motivation n’a rien à voir à l’ESS ! Choisissez une structure dont la taille et l’organisation vous correspondent.
Les 10 % de pertinence ont été généreusement accordés du fait du nombre de très grandes structures dans l’ESS proportionnellement moins important que dans l’économie classique.
L’ESS ne répondra pas à ce besoin, la taille de votre futur employeur, oui.
VOUS RÊVEZ DE MISSION PASSIONNANTES
DEGRÉ DE PERTINENCE : 50%
L’ESS sait (parfois) mêler innovation et efficacité
L’impact social et la flexibilité permettent de mener de beaux projets et de s’investir pleinement dans les missions au quotidien. Un participant témoigne : “Je suis dans une structure qui me permet d’innover, de tester, de remettre en cause le travail effectué, dont le mien. J’utilise mon cerveau, ce qui n’était plus le cas dans mes précédentes fonctions. Ma direction est à l’écoute. Cela aurait peut-être pu se faire dans une entreprise privée, mais je n’en suis pas sûr.”
Ou encore cette participante, ravie de sa décision : “Ma reconversion correspond totalement à mes attentes et l’impact sur ma vie a totalement dépassé mes espérances. J’ai l’impression d’avoir un espace immense de créativité et d’innovation, et en même temps d’apprentissage constant.”
En revanche, attention au manque de moyens et de capacité à quantifier l’impact qui représentent des problèmes récurrents d’après l’enquête. “Le problème du manque de moyens se pose rapidement, et la gouvernance souvent floue font que les belles idées restent trop souvent au stade de la discussion”. L’une des participantes précise que l’adaptation peut être difficile pour un salarié venu du privé. Le manque de budget et le flou dans l’organisation freinent la réalisation des projets et peuvent créer une grande frustration lorsque l’on se reconvertit pour changer les choses dans le monde.
Mais budget ou non, l’enrichissement personnel reste fort pour un grand nombre de participants à l’enquête : « J’ai découvert un environnement de travail extrêmement riche, stimulant, apprenant, innovant, dont je ne me doutais pas. Travailler dans ce secteur a fait mûrir mon regard sur la société et sur mon parcours de vie, ce que paradoxalement je n’étais pas venue chercher. C’est néanmoins un environnement très complexe, plein de contradictions parfois »
La question des moyens est moins importante que celle de la capacité de l’employeur à quantifier l’impact. En effet, nombre d’acteurs ont réussi à jouer sur d’autres leviers que les moyens financiers (le budget de Greenpeace France est celui d’une PME de taille moyenne) et en matière d’épanouissement, c’est plutôt la correspondance entre moyens et résultats qui comptent.
La possibilité de l’employeur à quantifier les objectifs sociétaux est par contre indispensable au fait de ne pas avoir la désagréable impression de pédaler dans la semoule. De notre expérience d’accompagnement des acteurs, être du côté des gentils suffira à vous remplir de joie pendant… 3 mois à 1 an.
Last but not least, le fait de trouver votre emploi du temps passionnant dépendra surtout du fait que le travail que vous faites chaque jour vous corresponde. En un mot, si vous n’aimez pas l’audit, vous n’aimerez pas l’audit social. Cette règle vaut même si travaillez demain dans une association créée par les réincarnations de l’Abbé Pierre et de Nelson Mandela.
Pour renforcer vos chances d’un travail passionnant, privilégiez en amont les structures qui montrent dans leur communication la capacité à se remettre en cause et choisissiez un métier qui vous corresponde.
VOUS VOULEZ FUIR LES JEUX DE POUVOIR INTERNE
DEGRÉ DE PERTINENCE : 10%
Rien à voir avec l’ESS.
Si les valeurs partagées par les équipes font l’unanimité, le management est souvent remis en cause. Les reconvertis dans l’ESS regrettent pour beaucoup “un monde utopique et très politisé”.
L’une des participantes interrogées a quitté son poste de cheffe de projet dans une agence de marketing pour se tourner vers l’ESS et y trouver plus de sens. Une expérience incroyable, mais contrebalancée par le mouvement de fond qui se trame dans les grandes structures associatives : “On prône un discours de bienveillance auprès des publics visés mais sans plus considérer les salariés. Le burn-out dans l’associatif ne devrait pas exister, or il y en a. (…)”.
A l’opposé, de nombreux participants témoignent de leur satisfaction dans des structures à taille humaine : “J’ai une équipe de rêve, un chef avec qui je m’entends à merveille, un boulot gratifiant et une utilité certaine!”
La raison de cette contradiction est due à une règle qui joue aussi bien pour les structures de l’ESS que les entreprises ou les administrations.
Il existe dans toute entité une proportion du temps passé par chaque personne salariée sur des enjeux externes et… sur des enjeux internes (les fameux et souvent détestables jeux de pouvoirs internes). Cette règle dépend d’une chose, la capacité du management à traduire à chacun les objectifs communs en objectifs particuliers.
Privilégiez dans vos candidatures les structures qui montrent dans leur communication la capacité à se donner des objectifs suffisamment précis.
GRANDE CONCLUSION
Elle n’est pas si grande que ça mais on trouvait ce titre chic.
Tous les participants s’accordent pour dire que chaque structure est particulière, et que l’ESS n’est qu’un mot qui recouvre des réalités très différentes. Un directeur de structure synthétise le tout : “On ne travaille pas “dans l’ESS”. On travaille pour une cause ou pour un public. Ensuite, on trouve la structure qui répond à cette problématique. Il faut se méfier de l’estampillage ESS car c’est un mot fourre-tout qui regroupe des mutuelles, des assureurs, des banques coopératives, des structures d’insertion ou encore culturelles… et donc, des réalités et des enjeux très différents.”
Quant à la recherche de sens, une participante est transparente : “L’ESS ne veut rien dire. On peut être utile partout, on peut “trouver du sens” partout. Demandez-vous quelles sont les vraies raisons qui vous poussent vers l’ESS et n’imaginez pas que c’est le pays des bisounours, car ce n’est pas le cas!”
L’enjeu de votre reconversion est donc de trouver les structures dont les valeurs, l’impact social, l’organisation et le management sont alignés au mieux avec vos valeurs et vos aspirations. Nous nous permettons de vous renvoyer à ce propos vers 9 questions utiles à votre réflexion.
Bien évidemment, comme tout quête du Graal qui se respecte, cette quête ne vise pas le Graal mais ce qui y ressemble le plus.
Enfin vous verrez vite que le simple fait de prendre le temps de cette réflexion changera votre manière de chercher votre prochain job de rêve.